préjugé [2]
nm (pré-ju-jé)	 
- 1Ce qui a été jugé auparavant dans un cas analogue. Cette sentence est un préjugé pour notre cause.
- 2Circonstance, apparence qui fait supposer ce qu'on doit craindre ou espérer. Je ne vois rien qui m'oblige à supprimer des événements remarquables qui se rencontrent dans mon sujet, et qui peuvent servir d'instruction et de préjugé en des occasions pareilles . [Pellisson, Histoire de l'Académie française]L'inutilité de la vie de quelques-uns [des prêtres] ne doit pas être un préjugé contre la régularité et l'utilité de la conduite des autres . [Fléchier, Sermons de morale]À son port, il ne douta point qu'il n'y eût de quoi former des préjugés avantageux sur tout le reste . [Hamilton, Mémoires du chevalier de Grammont]Lachaussée fait de très bons vers, du moins dans le genre didactique ; ce n'est pas un bon préjugé pour le genre de la comédie . [Voltaire, Correspondance]Un avocat qui ne se nomme pas, et c'est un funeste préjugé contre lui, écrit un libelle diffamatoire contre M. de Morangiès et contre moi . [Voltaire, Polit. et lég. Rép. à l'écrit d'un avocat.]
- 3Opinion, croyance qu'on s'est faite sans examen. Le défaut de nos examens c'est que nous ne nous examinons jamais que dans nos propres préjugés . [Massillon, Carême, Confess.]Ce mot va paraître un blasphème à l'idolâtre préjugé . [Lamotte, Odes, t. I, p. 360, dans POUGENS]Les préjugés de la superstition sont supérieurs à tous les autres préjugés . [Montesquieu, L'esprit des lois]J'appelle ici préjugés, non pas ce qui fait qu'on ignore certaines choses, mais ce qui fait qu'on s'ignore soi-même . [Montesquieu, Préf. de l'Espr. des lois.]Le soleil se lève, la lune aussi, la terre est immobile : ce sont là des préjugés physiques naturels . [Voltaire, Dictionnaire philosophique]Le préjugé est une opinion sans jugement . [Voltaire, ib.]Ce n'est point par préjugé que vous courez au secours d'un enfant inconnu prêt à tomber dans un précipice, ou à être dévoré par une bête ; mais c'est par préjugé que vous respecterez un homme revêtu de certains habits, marchant gravement, parlant de même . [Voltaire, ib.]J'ai rendu justice à l'Anglais Shakspeare, comme à l'Espagnol Calderon, et je n'ai jamais écouté le préjugé national . [Voltaire, Irène, Lett.]Si, en faveur du préjugé [qui admet que Turenne changea de religion à cinquante ans par persuasion], il faut adoucir ce trait, de tout mon coeur ; je ne veux point choquer d'aussi grands seigneurs que les préjugés . [Voltaire, Correspondance]Les préjugés, de quelque espèce qu'ils puissent être, ne se détruisent pas en les heurtant de front . [D'alembert, Mélanges etc. t. V, Réflexions sur l'ode.]Ces préjugés tiennent moins à l'ignorance qu'à la passion : l'Anglais a les préjugés de l'orgueil, et le Français ceux de la vanité . [Rousseau, Émile, ou De l'éducation]Les préjugés même doivent être discutés et traités avec circonspection . [Duclos, Consid. moeurs, 2]Un préjugé, n'étant autre chose qu'un jugement porté ou admis sans examen, peut être une vérité ou une erreur . [Duclos, ib.]On est revenu, depuis quelque temps, de beaucoup de préjugés ; mais on s'accoutume trop à regarder comme tel tout ce qui est admis . [Duclos, Oeuv. t. VII, p. 202]Les préjugés ne se retirent que comme les ombres, successivement et par degrés . [Bailly, Hist. astr. mod. t. II, p. 423]Il avait les principes et les préjugés qui servent à maintenir en tout pays les choses comme elles sont . [Staël, Corinne, ou l'Italie]On ne saurait trop le redire, préjugé est le synonyme de jugement précipité ; et on perd bien du temps pour vouloir aller trop vite . [Destutt-tracy, Instit. Mém. scienc. mor. et pol. t. I, p. 356]
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